Edito de Novembre 2020 : Education : de l’Amour à la liberté

« L’amour des éducateurs fait sortir l’enfant du chaos. » Pour la philosophe, l’enfant a un besoin vital d’amour et l’éducation peut se résumer ainsi : « volo ut sis » (je veux que tu sois). Or vouloir l’autre pour ce qu’il est, sans intérêt pour soi, n’est-ce pas là le principe même de l’amour ? L’amour semble alors être la source de l’éducation, autant que son déploiement. S’interroger sur l’éducation revient alors à questionner ce terme inépuisable de l’amour.

Dans sa richesse et ses facettes intarissables, l’amour a un principe d’unité : le vrai (auquel sont unis le beau et le bien). L’éducation véritable est donc orientée vers la connaissance. L’enfant nous y invite naturellement par ses litanies de « qu’est-ce que c’est ? pourquoi ? ». La transmission de savoirs et plus largement de notre culture est nécessaire pour l’édification des petits êtres qui nous sont confiés. Elle permet à l’enfant de s’émerveiller de la bonté de la réalité tout en discernant les mensonges qui peuvent l’entraver. La connaissance humanifie l’existence. L’ignorance la réduit et conduit à tout relativiser. La connaissance de ce qui est bien donne le goût de l’action car la Vérité nous met irrésistiblement en mouvement.

Concrètement, cette transmission de la Vérité passe tout d’abord dans une forme de rayonnement de la personne même de l’éducateur. Combien l’enfant est-il comblé par la bienveillance, la douceur et la force de ses parents ? Ensuite, la transmission passe par la stimulation des 5 sens qui éclairent l’intelligence : faisons écouter de belles musiques, des belles histoires à nos enfants ! Faisons-leur goûter les fruits de la terre, rendons-les attentifs à ce qu’ils sentent (les pages jaunies de l’album photo de famille ou le plat qui mijote). Laissons l’enfant découvrir les différentes matières qui le guideront dans ses premières constructions… Et enfin, parlons-lui, cherchons avec lui les noms des choses et leur raison d’être. Aidons-le à développer ses talents propres et à acquérir les vertus qui feront de lui une personne de bien.

Ayons conscience du trésor de la famille. Elle est le terreau de l’émergence des Personnes. On y apprend l’amour de l’autre, la maitrise de soi, le pardon, la réparation des erreurs, le service et la gratification. La complémentarité des membres d’une famille donne une identité à l’enfant. La gratuité des relations familiales lui révèle : « je veux que tu sois. ».

De jour en jour, il se construira en lui une ossature à même d’assurer son émancipation du cocon familial, il sera libre, il osera. Ainsi il pourra offrir au monde sa richesse unique.

« Si tu sais méditer, observer et connaître,
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n’être qu’un penseur ;(…)
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tous jamais tes esclaves soumis,
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire
Tu seras un homme, mon fils. »

Kipling 

Marie-Alice Dallant Adminsitrateur de l’AFC du Pays de Vannes 

*Interview de Chantal Delsol à la sortie de son livre « Un personnage d’aventure, petite philosophie de l’enfance » édition du Cerf. 2017